imaginons nos futurs
Etude prospective réalisée en partenariat avec l’ADULM
WATTIGNIES
Septembre 2051,
Qui aurait cru que le sud de la métropole lilloise deviendrait un des domaines viticoles les plus en vue de l’hexagone ? Il y a 30 ans, cela paraissait insensé et pourtant, aujourd’hui, le Blanc du Riez, produit sur les terres calcaires de la commune de Wattignies, est sur le point de bénéficier d’une Appellation d’Origine Protégée (AOP).
Pour Stanislas Cardon, DG du bureau de contrôle des appellations viticoles Invino Veritas : « Les conditions climatiques ont tellement changé ici… Vous vous rendez compte : des vignobles sur les terres de la bière ! Aujourd’hui les Hauts-de-France possèdent le même climat que celui de la Bourgogne il y a 50 ans. On nous a pris pour des fous en 2025 lorsqu’on a commencé l’encépagement avec du Chardonnay qui venait de Bourgogne. Et pourtant, voyez le résultat ! »
S’il se sent en bouche, ce résultat se voit aussi dans le paysage.Vignes et houblonnières se côtoient sans rougir l’une de l’autre, ponctuées ci et là de chais et de brasseries. Certaines de ces unités de production se sont même implantées au pied des tours du quartier du Blanc Riez, quartier qui a d’ailleurs donné son nom à la future AOP.


Au 12ème étage d’une de ces tours qui abrite à sa base la brasserie Duriez où l’on produit notamment la bière « La blanche Duriez», nous rencontrons Cindy, jeune retraitée de 73 ans. Elle était arrivée là un peu par hasard, en 2018, et ce quartier, au début, elle le détestait. «Il y avait beaucoup de HLM, beaucoup de jeunes au chômage et je peux vous dire qu’on s’ennuyait ferme. Il y avait un centre commercial, mais les boutiques étaient murées. C’était limite la zone. Et puis ils ont commencé à faire tomber deux ou trois immeubles, à mettre de l’isolation extérieur, à accrocher des terrasses un peu partout avec pleins d’escaliers extérieurs. Ils ont même construit des immeubles tout en paille. D’ailleurs à côté, ils ont mis une place commerçante et le vieux centre commercial est devenu une sorte de parc avec pleins d’arbres fruitiers. Ah ça les arbres, maintenant on peut dire qu’on est servi ! Avant c’était tout bétonné. Des voitures, des parkings… Partout ! Ils ont fait ça parce que l’air était trop pollué et aussi parce qu’avec les arrivées du Skytran et des Distridrones, ils ont commencé à surtaxer l’usage des voitures individuelles. Du coup voilà, maintenant là, j’ouvre ma fenêtre, et bien j’ai une grande terrasse ensoleillée. Je vois des champs, des vergers. J’entends les oiseaux. On peut vraiment pas se plaindre.»



A la sortie de son appartement, Cindy nous présente son voisin de palier Moktar, père de famille âgé de 52 ans, qui a passé toute sa vie dans le quartier du Blanc Riez. Il s’étonne du nouveau visage pris par sa cité. « Aujourd’hui j’ai l’impression de vivre dans une sorte de nouvelle Babil (ndlr Babylone en arabe). Tous ces jardins suspendus, ces terrasses, ces passerelles qui relient les tours entre elles. Avant c’était une jungle de béton quasi inhumaine, maintenant c’est une jungle de verdure où il fait bon vivre. Et puis, regardez, il y a cette cascade qui coule en continue du haut de la tour là en face. Je travaille justement à l’entretien de cette cascade et de son réseau car il faut sans cesse vérifier la qualité de l’eau qui circule en circuit semi-fermée. L’eau de la cascade rafraîchit l’air l’été, coule dans les canaux suspendus et ceux qui irriguent les champs de la cité. C’est vraiment magnifique.»

Cet endroit presque idyllique n’aurait jamais pu naître sans la décision radicale prise par la MEL en 2026 de stopper net l’artificialisation des terres. Dans les années 20, les politiques foncières sont en faillite. Elles ont abandonné l’agriculture et les espaces forestiers à des exigences financières court-termistes contraires à la sauvegarde des écosystèmes, du climat et de la qualité de l’alimentation dont nous dépendons tous. Cette nouvelle politique de zéro artificialisation nette a permis de réguler les marchés fonciers, mais elle a surtout encouragé l’installation de nombreux paysans bioéthiques. L’implantation de zones de revitalisation agroécologique dans les quartiers prioritaires semblait pour certains vouer à l’échec, pourtant des lieux inattendus, comme le Blanc Riez, sont devenus en quelques années de véritables coopératives agricoles soucieuses du bien être commun.

